" La mission a eu connaissance de 134 allégations de massacres"

LE MONDE

13-14/07/97

Voici les principaux extraits du rapport de la mission de lONU:

Il apparaît des récits entendus ou lus par la mission que les actes de violence attribués à l'AFDL ont été perpétrés
contre des réfugiés à l'intérieur des camps de réfugiés, non seulement au début de la guerre, mais encore jusqu'au mois de mai [1997] au moins. Très souvent, les cibles n'ont été ni les combattants Interrahamwes ni les anciens soldats de l'ex-FAR: Il s'est agi aussi de femmes, d'enfants, de blessés, de malades, de moribonds et de personnes âgées, sans que l'on puisse leur attribuer un dessein belliqueux précis 

La mission a eu connaissance de 134 allégations de massacres. Les victimes sont, le plus souvent, des réfugiés, mais également des habitants des villages zaïrois à majorité hutue, présumés d'avoir aidé les réfugiés. Les informations reçues font état de plusieurs milliers de personnes tuées, parmi lesquelles figurent un grand nombre de femmes et d'enfants. [ .. ] 

Des dizaines de milliers de personnes, en particulier des réfugiés, auraient disparu. Certains d'entre eux, poussés vers les forêts, sont probablement morts de maladie, de malnutrition, s'ils n'ont pas été massacrés. [... ]

De nombreux témoignages font état d'une insupportable odeur de charnier dans le KIVU [ .. ]

L'AFDL a, à plusieurs reprises, fait participer la population locale aux atrocités. Le rapport et les témoignages reçus amènent à penser qu'il n'est pas possible «écarter le caractère systématique [des crimes], produit d'une préparation préalable. La tactique qui consiste à assiéger le camp avant de l'attaquer [ ..], l'invitation faite aux habitants des villes à majorité hutue à se réunir dans les écoles et les églises pour ensuite les massacrer, l'appel trompeur lancé par la voie de la radio officielle à tous ceux qui se trouvent dans la forêt pour les encourager à venir recevoir des soins médicaux et une aide alimentaire, avant de les assassiner, en sont autant d'illustrations. [..]

On ne peut nier que des massacres de caractère ethnique ont été commis, dont les victimes sont, en grande partie, des Hutus, rwandais ou burundais et zaïrois. [ ..] Ces crimes semblent revêtir un caractère suffisamment massif et systématique pour que la qualification de crime contre l'humanité puisse leur être attribuée. [..]

La question de savoir si un génocide a été planifié et exécuté mérite d'être posée. En effet, on peut constater l'appartenance ethnique commune de la majeure partie des victimes: Hutus zaïrois et réfugiés Hutus rwandais, et Hutus burundais.

Les méthodes utilisées, à savoir les massacres délibérés et prémédités, la disparition de réfugiés dans les zones inaccessibles et inhospitalières, le blocage systématique de l'aide humanitaire, le refus opposé jusqu'ici, toute tentative de  mener une enquête impartiale et objective [ .. ], sont autant d'éléments troublants. [..] 

@AGNews 2002